Brice Lalonde (Ancien ministre), Le Figaro
28 Octobre
2002
L'histoire avait pris fin avec la chute du
Mur de Berlin. Elle a repris son cours avec la
destruction des tours de New York. Elle
oppose le fascisme islamiste a la civilisation
occidentale. Une guerre sans merci a
commence. Elle va durer de longues annees, employer
toutes les armes, ouvrir tous les fronts,
se mener sur tous les continents. Pour la gagner, il nous
faut des Churchill, non des Daladier.
La plupart des hommes politiques francais
ont vu dans le 11 septembre une peripetie,
monstrueuse certes, mais qui ne constituait pas a leurs yeux un evenement
geopolitique majeur.
C'etait simplement un attentat plus elabore
que les autres. Au reste il visait les Etats-Unis, non
la France, qui a tant d'amis dans le monde
arabe. Et nos dirigeants ne cessent depuis lors de
pretendre calmer le jeu, rassurer la population et faire la lecon aux
va-t-en-guerre.
Qu'un petrolier explose au large du Yemen, nos chefs ne peuvent se prononcer. Il
faut attendre.
Un an plus tot, une usine explosait a
Toulouse. Sur-le-champ, le procureur mit en cause
l'entreprise, forcement coupable. A Beziers
un homme ceint du bandeau d'Allah a ouvert le feu
au lance-roquette. Ce n'etait qu'un
malfaiteur, avec une arme d'un modele perime. A
Guantanamo, on apprend que des Francais
avaient rejoint les rangs talibans. Ce sont des
idealistes injustement detenus. Dans la
region parisienne un conseil municipal est mitraille . Par
hasard, le fou avait frequente les camps
bosniaques. Un maire en exercice est poignarde. Son
agresseur est evidemment desequilibre.
Qu'importe qu'il soit un zelote d'une religion dont les
extremistes n'aiment ni les homosexuels ni les femmes.
Dans certains pays les premiers sont
executes, les secondes sont lapidees. Au mieux elles
recoivent de l'acide au visage, comme au
Pakistan. Heureusement nous ne verrions pas de
femmes egorgees ni brulees vives au pays
des droits de l'homme dont les defenseurs
professionnels assignent Oriana Fallaci en
justice, mais laissent les imams precher la guerre
sainte, dont les derniers marxistes
manifestent contre les Etats-Unis, mais pas contre les
attentats sanglants de Djerba ou Bali, dont
le ministre de l'Interieur lutte contre le terrorisme,
mais recoit l'inspirateur et financier du
fascisme islamiste, le Saoudien Abdullah Turki,
missionnaire de la charia.
La derobade ne nous sauvera pas. Nous
aurons les bombes, evitons le deshonneur. Pourquoi
s'acoquiner avec le Pakistan, le Soudan ou
l'Arabie saoudite ? A cause des errements de notre
diplomatie, onze Francais ont trouve la
mort a Karachi. En abandonnant Massoud et en vendant
nos sous-marins au Pakistan, nous avons
paru donner des gages aux islamistes. Ils ne nous ont
pas pardonne ensuite notre appui a
l'intervention americaine en Afghanistan. Gardons-nous de
croire que nous pourrons conserver de
bonnes relations avec les uns tout en faisant un
minimum de guerre avec les autres.
Il est de bon ton de se moquer de George
Bush. L'axe du Mal parait simpliste. Que notre premier
ministre s'interroge cependant sur le
financement des mutins qui occupent le nord de la Cote
d'Ivoire, qu'il surveille l'avancee
islamiste vers l'Afrique tropicale, les troubles au Kenya, la
charia au Nigeria. Qu'il prenne en compte
l'appui de l'Irak au terrorisme, la dissemination des
armes nouvelles apres la decomposition de
l'Union sovietique, le gazage des villages kurdes, les
recompenses offertes aux familles des
bombes humaines de Palestine. Qu'il verifie l'origine des
fonds et la formation des militants de
certaines associations humanitaires ou culturelles. Qu'il
voit le monde tel qu'il devient, qu'il
evalue le poids de la demographie. A la surface de la planete,
l'islam est la religion d'un homme sur
quatre. L'objectif des islamistes est de retourner cet
homme-la contre nous. Et de nous detruire.
Dans un souci d'apaisement, nous pouvons
decider de matiner notre Code civil d'un peu de
charia, accepter la progression du voile
chez les femmes, fermer les yeux sur les manifestations
antisemites. Cela plaira a ceux qui
preferaient naguere etre rouges plutot que morts, mais ne fera
qu'accelerer une polarisation ineluctable.
Alors la violence deviendra quotidienne. Entre le
fascisme et la resistance, chacun sera
oblige de choisir son camp. C'est pourquoi il faut prendre
les devants, aider les democrates du monde
musulman, contribuer au bien-etre de leurs peuples,
trouver un reglement au Proche-Orient, mais
ne rien ceder au fascisme islamiste. Quand un
ennemi nous declare la guerre, la mobilisation est la seule priorite.