Bonjour
Les temps ont changé. C’est le constat désabusé dont je voulais vous faire part, en étayant ma thèse avec des arguments finement coupés pour en relever le goût en évitant l’écueil de l’affirmation, aussi vaine qu’aisée.
Alors que je réfléchissais sur les doutes, compréhensibles mais nébuleux qui animent ma grande sœur quant à la possibilité de divorcer de son époux, j’ai pris conscience d’une chose étrange…
Il fallait que je te fasse part, cher lectorat, d’une découverte qui vient d’anéantir de façon plus ou moins définitive (il ne faut jamais dire « fontaine » il paraît que ça fait pleuvoir) mes espoirs en un monde meilleur rempli d’une homme de style normal et de sa progéniture éventuelle…
Euh comment dire en terme simple : le mari de ma chère sœur, fait partie
d’une classe d’hommes rares en voie de disparition totale, qu’il convient de protéger et de chérir, j’envisage même de prendre un accord avec Greenpeace pour voir si y’a moyen de l’inclure dans leurs programmes de protection officielle au même titre que les baleines blanches.
En gros, je me suis rendu compte ce matin, alors que l’idée de travailler
pour de vrai me chatouillait vainement le cortex, que nous vivons une époque de grand n’importe quoi.
J’explique :
La grande préoccupation des femmes depuis la nuit des temps est de dire «
j’ai deux enfants à la maison ». L’homme est un grand enfant, incapable de
s’occuper de lui tout seul, et qui sous des allures de testostérone
aguerrie, sait qu’en terme officieux, c’est sa femme qui porte la culotte à
la maison.
« Il faut que je gère tout »
« Il ne sait pas prendre des décisions, et lorsque je le fais à sa place il
se l’approprie »
« J’en ai marre de ramasser : ses chaussettes/sachets de thé/caleçons/slip
kangourou/canettes de bières/paires de baskets/string panthères »
« etc … »
Voila ce que j’entends sortir, à peu de choses près, de la bouche de ma sœur. Ce à quoi en bonne grand-mère que je me sais être, je réponds d’un air avisé : on se plaint, on se plaint, on sait ce qu’on perd mais on sait pas ce qu’on Retrouve (c’est ben vlai ma ptite dame).
Je viens de passer quelques heures sur le site d’un certain Nick qui
s’intitule « jeniquec’estmythique », lequel raconte à grand renfort de
statistiques, un an de rencontres sur meetic (je vous passe la déception inhérente au fait que je suis présentement en train de rédiger une histoire très similaire pour le compte d’un jeune homme rencontré dans des circonstances aussi louches que lui).
Les voila, les hommes d’aujourd’hui, en comparaison avec ceux d’avant : des
mollusques invertébrés couchés sur pixels qui t’abordent en te demandant si
tu es d’accord pour des « moments chauds et câlins, sans prise de tête ».
Des goujats qui s’assument et s’offusquent que tu répondes « vafanculo »
lorsqu’ils te disent dès le premier mail « attends, je te préviens d’office, euh je cherche pas une relation sérieuse, on peut discuter dans un café et si ça colle on va sur mon canapé pour que je te biiiiip la biiiiiiip, mais on peut discuter un peu avant, on est pas des animaux ».
L’écrit a tué nos conventions ma vieille, nos bonnes vieilles hypocrisie de
comptoir, les « bonsoir mademoiselle, vous êtes seule, vous vivez chez vos
parents, vos yeux scintillent comme les étoiles au firmament, maman ».
Et le pire c’est que ça leur paraît normal : « tu as des photos ? » « joli
décolleté, tu m’as l’air coquine, es-tu coquine ? (on sait jamais des fois
qu’elle réponde « nan je suis une planche à pain qui a passé la nuit au
frigo sombre connard »).
« ça te dit qu’on se chauffe un peu ? si tu étais sur un canapé, tu ferais
quoi pour me montrer que tu veux … (même pas le courage de finir sa phrase)
et là j’imagine sa gueule déformée par la perversité… z’avez déjà vu un mec
prendre un air coquin comme une femme ? ça pue la merde.
En gros, mes amis, et ma chère soeur, ces mecs là sont pléthores aujourd’hui, tous les mecs à tendance pas trop mal d’il y a vingt ans se réfugient désormais derrière leurs écrans pour laisser libre cours à leurs maudites pulsions sans plus se préoccuper de SEDUIRE.
Je vais te dire, public (a y est je m’y crois) je m’y connais hein, je suis en train d’écrire l’histoire de l’un d’eux, et pas des moindres en plus, le plus pire de tous les pires lui. Il est tellement déformé que quand on se voit pour qu’il me raconte ses histoires il me demande de le sucer (respire ma vieille … tu as l’esprit ouvert, tu es une femme moderne… ne saisis pas le stylo … non pas dans l’œil … non ….). Il insiste le bougre, sur le fait que le livre avancerait mieux si nous étions libérés tous deux du joug de cette attirance difficilement contrôlable (il le dit pas comme ça, évidemment), sur le fait qu’il ne se sent pas bien, car il aurait aimé être sucé ce midi (tu crois rêver ? ha ha mais tu es en plein dans la réalité ma chérie).
Je reste ferme, un peu trop directe peut-être (« Ecoutes Dumbo … euh
Mathieu, je coucherais avec toi le jour où je serais suffisamment désespérée pour n’envisager aucune autre solution, ce n’est pas flatteur tu ne devrais pas accepter ça » ou encore « putain mais t’arrêtes avec tes conneries merrrrrdddddee !!! »).
Je crois que ce mec est un mythomane complet, mais je m’en fous, je
m’inspire …
Le problème, c’est quand il se met en tête de s’étendre sur les « détails » de ses aventures dans l’espoir de provoquer en moi quelque pulsion ravageuse à l’écoute de la façon dont il a truqué le truc de la vieille truc sur la table en bois … (ah ouais !! 7 fois en deux heures !! T’as la pêche mon gars ? Si je veux ? Non toujours pas non, surtout pas 7 fois (déjà qu’une fois, j’ai des nausées)).
C’est pas fini, je me suis rendue compte que j’en avais connu plus que de raison des comme ça… des qui t’envoient des lignes et des lignes de mots plus crus qu’un tartare et sans les frites coupées au couteau, vous pensez bien.
J’y ai toujours jeté un œil aussi attendri que condescendant devant les fautes d’orthographes odieuses et la rhétorique débile de certains d’entre eux, mais les voir dorénavant se vautrer dans la certitude d’être un mec top classe, top tendance, qui vit high tech et moove à la pointe du groove, c’en est trop.
Alors sus aux conversations msn percluses d’invitations à la souplesse verbale, surtout quand mon ordinateur fait face à la porte (je le dit et le répète mais faut croire qu’il y en a qui savent pas lire).
Il « vivent » à travers ses échanges, sans même se rendre compte que nous, si on a participé un jour avec entrain, pour l’attrait de la nouveauté, aujourd’hui on aimerait qu’ils arrêtent ne serait-ce que quand on répond mollement que ça me ferait plaisir un bracelet Dinh Van pour mon anniversaire…
EGOISTES, voila ce qu’ils sont … sauf qu’aujourd’hui ils ne s’en cachent
plus, et l’affichent, l’écrivent, le bloguent à tous vents camouflés
derrière leur « nickname » (intéressant n’empêche) dans leurs slips
de la veille au lieu de se mettre un peu de gel et d’aller nous montrer leur égoïsme dans un bar ou une boite, de façon virile, comme un homme !
C’est ça que tu vous voulez mesdames ? Un new-generation guy ?!!
Heureusement pour la survie de l’espèce non-archivée dans les statistiques d’un blog, il reste des hommes qui ne sont pas trop internet, des flics, des pompiers, des charpentiers en début de carrière, des maçons, des plombiers polonais et quelques autres représentants portugais (ou non) de la classe ouvrière. Dans la catégorie « moyenne gamme », il n’y a plus que des chefs de projets, responsables informatiques, commerciaux, marketing, et ceux là sont en passe de devenir les mollusques invertébrés décrits plus hauts, ils n’attendent que le coup de grâce : la rupture. Enfin dans la catégorie « haut de gamme », les avocats, médecins, et autres intellectuels, c’est que du marié ou de l’antisémite… autant dire qu’on est pas rendues…
Voila la conclusion attendue de ce message long grain qui ne colle pas :
Niquersurmeeticc’estpathétique.
Fanny BERREBI la reine du freesbee (je renvoie ce que je reçois, et dans la
gueule si possible)
PS : Si j’envoie ce texte à un magazine, j’ai combien de chances qu’ils achètent et combien qu’ils me le renvoient, hilares en disant « hé ho ! Tu t’es cru chez tata ou quoi ?!!! » ?
PPS : Messieurs, je vous aime, je tiens à ce que vous sachiez que je ne vise personne en particulier (cesse de te cacher toi là bas, je parle pas de toi), excusez d’avance la tendance féministo-testostéronophobe genre la vieille célibo qui maugrééééééééééé, mais j’avoue, ça me fait vachement marrer.