L'ascète porte la joie sur son visage et le deuil en son coeur.
Son coeur est très large et son âme très humble.
Il n'a aucune rancune, nulle convoitise, ne médit de personne, méprise les honneurs, déteste le renom ; son maintien est noble et il garde la mémoire du bien qu'on lui fait.
Il est patient, reconnaissant, rempli de pudeur et ne sait offenser.
Il rit sans excès et garde son calme dans sa colère même.
Son rire est un sourire.
Il n'interroge que pour apprendre ; il est très savant, très humble, sa décision est ferme.
Il ne se précipite, ni ne s'égare.
Sa conversation est courtoise, ses réponses affables, ses irritations justifiées.
Il est complaisant quand on a recours à lui, sincère dans son affection, fidèle à sa parole.
Il agrée le décret du Seigneur, domine ses passions, parle avec douceur de ceux qui lui nuisent, ne s'occupe jamais de ce qui ne le regarde pas, ne médit de rien.
Il s'attriste avec ceux qui sont dans la tristesse ; il charge peu les hommes et les aide beaucoup.
Lorsque la détresse s'abat sur lui, sa gratitude est la plus forte et plus longue sa patience au temps du dommage.
Il donne à qui demande, pardonne à qui le trouble, est généreux envers l'avare, et si l'on rompt tout lien avec lui, il répond par une solidarité encore plus agissante.
Il est plus doux que la crème, plus savoureux que le miel.
Il prêche la vérité, parle avec droiture, renonce à ses espoirs et attend son dernier jour !
Sa parole est un acte ; il est sage, énergique, ami du genre humain, irréprochable en son caractère.
Luminaire de la terre, soutien du pauvre, salut de l'opprimé, discret à l'excès, il ne dévoile jamais son secret.
Sa souffrance est grande, mais ses murmures sont rares ; il est joyeux lorsqu'il peut répéter le bien dont il a été le témoin, mais cèle le mal dont il a connaissance.
Ba'hya Ibn Paquda "Les Devoirs des Coeurs"
Si chacun de nous voulait bien tendre vers la perfection d'au moins d'une de ces caractèristiques, je pense que le monde aurait un autre visage, et les hommes une vie meilleure.