19 Avril 1943.
Veille du seder de Pessah.
La révolte du ghetto de Varsovie éclate.
Au milieu des bombardements, le petit Moïshe demande à son père :
« Ma nichtana a layla hazé, mikol a leilot ? »
« Pourquoi cette nuit est elle différentes de toutes les autres ? »
Son père lui répond selon la tradition : « Hier, nous étions esclaves, aujourd’hui des hommes libres ». Libres ? C’est ça la liberté ? Sort elle de la cheminée de Birkenau ?
Ce petit garçon, haut comme 3 pommes, mais déjà adulte, reprend alors :
« Papa, y aura-t-il encore un juif sur terre demain ? Y aura-t-il encore un juif sur cette terre l’an prochain pour chanter le Ma Nichtana ? » Et son père, visionnaire optimiste même dans l’atrocité, lui répond : « Oui mon fils, toujours. Il y aura toujours un petit Moïshe sur la terre pour chanter le Ma Nichtana, toujours ».
Voici une des nombreuses histoires qu’on a pu entendre durant ce voyage en Pologne.
Et me voici. Moi, jeune juif de France, plus de 60 ans après, en Pologne, sur les traces du petit Moïshe, si jeune et pourtant bien plus adulte que moi.
J’ai vu ces milliers de personnes marcher sur les pas de nos pères jusqu’à Birkenau.
J’ai vu les restes du mur du ghetto de Varsovie encore transpercé des balles allemandes d’un coté, et des balles des pistolets des amis d’Anielewicz de l’autre.
J’ai vu les fours encore chauds.
J’ai vu la baignoire des officiers allemands collée à la pièce des fours, pour qu’ils puissent profiter du « spectacle ».
J’ai vu les oiseaux chanter sur une pelouse verte et ensoleillée sous laquelle se trouve 100 000 des miens.
J’ai vu cette montagne de poussière à Majdanek qui a fait couler nos larmes lorsque nous avons compris qu’il s’agissait des cendres de notre peuple.
J’ai vu tous ces lieux qui sont le symbole de l’atrocité dont est capable l’humanité.
J’ai vu Ariel Sharon invoquer le souvenir de nos frères et sœurs disparus, et le regard masqué par les drapeaux bleu et blanc, démontrer que ni Aman, ni Hitler ne pouvait empêcher un peuple de chanter l’Hatikva autour d’une étoile devenue bleue.
Je ne sais pas si j’ai encore réalisé et compris, mais j’ai vu.
Et vous aussi vous devez voir.
Pour la mémoire de ceux qui n’ont pas eu le droit à une tombe, pour la mémoire de ces enfants déjà adultes malgré eux, pour la mémoires des résistants, ceux qui sont morts les armes à la main comme ceux qui se sont cachés quelques heures de plus, pour faire revivre ces 6 000 000 de héros, vous aussi, vous devez voir …
Dan