En soutien à l'appui de la thèse de la patrilinéarité initiale, juste pour montrer que ce n'est pas "un délire de cette pauvre Nath3" voir l'excellente contribution en ligne de Joseph Mélèze Professeur émérite de l’Université de Paris-I Panthéon-Sorbonne
http://grenier2.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/Pere_ou_mere__Aux_origines_de_la_matrilinearite_juive.asp
extrait :
Le fait est que ni la nullité juridique du mariage mixte ni la règle de la filiation matrilinéaire ne sont nulle part proclamées par le législateur biblique. Sans doute la Tora réprouve-t-elle l'union avec l'étranger comme un danger potentiel pour l'intégrité du culte du vrai Dieu (Ex. 34, 16 ; Deut. 7, 1-5). Cependant, plusieurs couples mixtes sont présents dans le récit biblique. Joseph épouse Asénath, fille du prêtre égyptien Poti-Phéra, que Pharaon lui donne pour femme (Gen. 41, 45) ; Moïse prend pour femme Séphora, fille du prêtre madianite Jethro (Ex. 2, 21) ; plus tard, on lui attribuera une femme « koushite » (Nmb. 12, 1), ce qui pourrait signifier qu'il a épousé aussi une « Éthiopienne », à moins que le terme ne renvoie à la Madianite Séphora. La légende se chargera plus tard de judaïser rétrospectivement ces étrangères, soit en les convertissant au judaïsme soit en leur attribuant une origine israélite. En fait, à cette époque lointaine, la femme étrangère était, par son mariage avec un juif, intégrée à la société juive ; le problème de sa judéité et de celle de ses enfants était ainsi résolu à l'avance.
Dans la perspective de l'histoire du droit cette situation est paradoxale. La matrilinéarité est en contradiction avec la loi biblique, résolument patrilinéaire ; elle fait figure d'exception dans le droit familial rabbinique lui-même qui, en dehors de la filiation, respecte la patrilinéarité pour les règles qui fixent les liens de parenté et celles qui président aux successions à cause de mort. Il en va ainsi, par exemple, pour le sacerdoce héréditaire : on n'est pas cohen par sa mère, mais par son père. Le Talmud de Babylone résume cette situation dans une formule lapidaire : « La famille du père est considérée comme étant celle de l'enfant, la famille de la mère ne l'est pas » (TB, Baba Batra 109b). En somme, ainsi que s'est appliqué à le démonter notre confrère américain Shaye Cohen, la matrilinéarité apparaît comme une innovation introduite dans le droit juif par les Sages de la Michna, en rupture avec la loi biblique observée par les juifs à l'époque du Second Temple.